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Conseillé par sandrine5726 septembre 2012
Tourmenté, solitaire, taciturne et irascible, le jeune Rodion Raskolnikov a été contraint d'abandonner ses études de droit par manque d'argent. Mais au lieu d'essayer de les financer en donnant des cours ou en acceptant des traductions, il préfère s'enfermer dans la minuscule mansarde qui lui sert de chambre, à broyer du noir et à élaborer de sombres théories sur l'humanité. Ses réflexions le mènent à penser que les hommes peuvent être rangés dans deux catégories: celle du "troupeau", de la masse qui obéit et se contente de peu et celle des Grands Hommes voués à un destin d'exception. Et, si par malheur, un de ces grands hommes serait empêché d'accomplir son destin par la misère, rien ne s'oppose à ce qu'il commette un crime pour sortir de sa mauvaise passe. Supprimer un être vil et malfaisant et s'emparer de ses biens serait même grandement profitable à la bonne marche du monde.
Fort de ses convictions, Raskolnikov met au point le projet d'assassiner Aliona Ivanovna, une vieille usurière pingre et mauvaise. Après moult réflexions et atermoiements, il se rend donc chez elle, la tue à coups de hache, se voit obliger d'occire sa soeur rentrée prématurément et s'enfuit en emportant une bourse et quelques objets. Cependant, une fois son forfait accompli, pour Raskolnikov, le choc est rude entre la théorie et la réalité. Malade physiquement et mentalement, le jeune homme assume difficilement son acte. Et ni son ami Razoumikhine, ni sa soeur, ni sa mère, malgré toute leur affection ne peuvent le secourir. D'autant que Porphyre Petrovitch, le juge chargé de l'affaire joue au chat et à la souris avec lui, le menant de la paranoïa aux portes de la folie.Son salut viendra-t-il de Sofia Semionavna, timide jeune fille, obligée de se prostituer pour nourrir sa famille?Ah! La littérature russe! Elle intimide, elle peut même effrayer le plus téméraire des lecteurs...Et pourtant, qu'il est plaisant et facile de lire DOSTOÏEVSKI et de suivre Raskolnikov dans les rues de Saint-Pétersbourg. On y ressent l'âme russe telle qu'on se l'imagine, le ton est mélodramatique, les sentiments sont exacerbés, la gestuelle outrée. Les femmes pratiquent l'abnégation et le sacrifice comme un art de vivre. Elles ne s'inquiètent pas, elles deviennent folles, réellement folles. Elles ne pleurent pas, elles sanglotent, crient, hurlent même.
Raskolnikov, sombre et tourmenté, est un être orgueilleux, sûr de sa valeur et de son bon droit, mais qui va faire la découverte de sa condition d'homme ordinaire. Il n'est pas sympathique, il énerve, fait fulminer le lecteur et l'on se demande comment il réussit à s'attacher si fidèlement Dounia ou Sofia, jeunes filles bonnes et dévouées. A force d'amour, la soeur vertueuse et surtout l'amie pervertie par la misère sauront amener Raskolnikov a accepté son châtiment.
Car, outre une réflexion philosophique sur le Bien et le Mal, le crime, la culpabilité et la rédemption, Crime et châtiment est aussi une peinture de la Pétersbourg tsariste avec la misère pour toile de fond, les quartiers populaires, les logements insalubres, l'alcoolisme, la maladie qui sont l'apanage des classes populaires des bas-fonds de la ville.
Une belle expérience, riche et intéressante à lire sans hésitation.